Ca doit ressembler à l'image et les plus-values invisibles disparaissent.
Au sein de ma galerie marchand-mercier,
je propose depuis 2011 des pièces uniques, du mobilier d’ébénistes, de marqueteurs,
dont la marqueterie de paille et de parchemin, des tapis haut de gamme, du papier-peint à la main ou à la planche, du cuir doré de Malines dit de Cordoue, des ferronniers,
des sculpteurs, des laqueurs, des restaurateurs du patrimoine,
et des créations à la frontière de l’art et de l’artisanat.
Je me suis adressée pendant neuf ans, aux grands cabinets de décorations,
maisons du luxe, architectes d'intérieurs, afin de leur proposer mes services en tant que prescripteur d'artisans d'art, et d'ateliers détenteurs de savoir-faire rares.
Ces ateliers m'avaient fait confiance pour gagner en visibilité sur le marché haut de gamme de la décoration. Le temps d'attente avant l'obtention d'un marché et les systèmes d'appel d'offre, ont mis souvent à mal nos relations de confiance.
J'ai du endosser le métier de commerciale, et distribuer à tout va des échantillons, comme si les métiers des artisans sélectionnés ne représentaient que des items reproductibles au rythme industriel.
Ma démarche était au contraire de favoriser des rencontres pour la mise en oeuvre de projets uniques.
J'avais fait miennes les notions de slow made, encouragée par Marc Bayard
du Mobilier National engagé aussi dans cette démarche.
C'était sans compter sur cet équivalent slow made = slow économie.
Si ce modèle économique s'est donc avéré difficile, c'est par la permanence de mes chantiers en tant qu'architecte d'intérieur, que j'ai maintenu le cap.
Les métiers d'excellence ne peuvent le rester qu'à la condition de se plier aux règles du marché du bâtiment d'aujourd'hui. Participer à la mise au point du produit, en face to face avec les créateurs, permettre de trouver des solutions esthétiques, et de mettre au point des échantillons, ne garantit pas l'obtention du marché.
Et que devient tout ce temps non rémunéré ? Il finit dans la moulinette des appels d'offres, du jeux des sous-traitants et des tableaux excel,
avec la logique du descriptif de référencement d'un produit ou son équivalent.
Mais de quelles équivalences parlent-on? Dans un produit, répondant au DTU au CSTB, il est question de performances techniques normées, et bien rarement encore de performances environnementales ; alors que dire des non-performances des manufactures, ne regroupant que quelques mains.
Au mieux et trop souvent, on se contente de l'image vendue.
Ca doit ressembler à l'image et toutes les plus values invisibles disparaissent.
Que ce soit le choix d'un savoir-faire mis au point par une personnalité ou une industrie particulière, de nouveaux outils de production, de favoriser le local, un sourcing particulier, des PME, ...que ce soit dans le cas d'artisans ou celui d'industriels désireux de plus value anticipée sur des valeurs hors normes, tout cela ne rentre en ligne de compte que de manière exceptionnelle. Et chacun sait reconnaitre les créateurs, designers qui s'engagent dans un travail de dialogue jusqu'au bout avec les artisans.
A un certain niveau de marché, le descriptif d'un DCE "tel produit ou équivalent" porte atteinte dans le cas des artisans d'art à leur travail de mise au point.
Et quand le marché leur échappe, pour toutes ces raisons,
en plus de subir la disparition voir la copie du prototype, ils reçoivent des demandes
de chiffrage ou leur prix doit se diviser par 2, voir par 3 quand il faut y inclure la pose en plus...
Et malheureusement, elle encourage la copie entre ateliers.
Bien sur la technique est mécanique,
mais l'assemblage reste créatif.
A quand un droit d'auteur sur un process et un dessin issu d'ateliers ?
Le débat sur ces questions et bien d'autres
sera à suivre lors de la remise officielle du rapport
France, Metiers d'excellence
le 4 avril au Mobilier national
par Messieurs Lemoine et Huppé
au 1 rue Berbier du Mets, Paris 13e de 8:15 à 18:00